L'inconnu du lac

Je me dois de vous parler de L'inconnu du lac et celà à plus d'un titre. D'une part par ce que ce film nous plonge dans un univers de la drague homo, ensuite parce que Pierre Deladonchamps qui vient de décrocher le César du Meilleur espoir masculin est un petit gars de Nancy. Ce film nous plonge dans la dure condition de l'homo de province dont les options de drague sont bien plus limitées que celle des homos des grandes villes  et qui se limite le plus souvent à quelques mètres carrés dans un parc ou au bord de l'eau à la recherche de son alter égo en mal de sexe et d'amour.

La réalisation du film sur ce plan est implacable. On va rester pendant toute la durée du film le long de cette berge 100% homo. Ce film en plus d'être un film sur la condition homo est aussi et avant tout un film qui nous met à nu.
Le premier à en pâtir est bien sûr Pierre Deladonchamps notre jeune espoir, dont l'anatomie n'a plus de secret pour personne à la fin du film. Si on y regarde à deux fois on se rend vite compte que L'inconnu du lac n'est pas tant un film sur l'homosexualité que sur la sexualité tout court. Le contexte homosexuel du film ne fait que ressortir la grande question que tout le monde est en droit de se poser à savoir celle du lien entre l'amour et l'attirance sexuelle. Homo ou non.
Pourquoi un sentiment aussi noble que l'amour doit-il inévitablement s'accoquiner avec cet autre sentiment moins recommandable qu'est l'attirance sexuelle? Bien sûr, quand les homos n'avaient pas tous les droits, tout était plus simple. L'amour était noble et l'attirance sexuelle était naturelle. On se dédouanait donc facilement de nos attirances sexuelles en se disant que l'on ne peut rien contre la nature .

Si L'inconnu du lac nous enferme dans un monde 100% homo ce n'est donc pas tant pour nous montrer un lieu de drague homo que pour nous enfermer dans un laboratoire.

Les bons scientifiques le savent pour analyser un phénomène il faut pouvoir l'isoler. Notre rat de laboratoire se sera donc Franck, seul sur sa berge avec d'un coté un homme physiquement/sexuellement attirant et moralement détestable (Michel) et de l'autre un homme aimable mais physiquement repoussant dont l'orientation sexuelle est volontairement brouillée. Dans notre laboratoire la nature n'agit plus puisque la naturelle attirance qu'un homme pourrait avoir pour une femme pour des raisons ancestrales de procréation n'a plus d'emprise sur cette berge du lac avec nos protagonistes.
Alors sans les pulsions sexuelles de la nature amour et amitié pourraient-ils ne faire qu'un ? Qui de l'amour platonique ou de l'amour sexuel aura raison de l'autre dans ce microcosme insensible à nos attirances naturelles ? Le verdict est sans appel.  L'érotisme qui s'est construit sur la base ne nos pulsions sexuelles se révèle à la fin du film plus fort qu'un amour sincère et assexué. Pour Frank, notre héros, le plaisir de mourir semble plus doux que l'ennui de vivre.

La question que soulève ce film dépasse donc bien sûr largement celui de l'homosexualité puisqu'il  pose cette incontournable question de l'existence d'un amour sans érotisme, d'un amour finalement où l'on serait capable d'aimer l'autre avec passion sans y retrouver la réflexion de son image. L'érotisme est un grand miroir comme ce lac dans lequel le désir érotique qu'incarne Michel nous entraine vers le fond. Le pire c'est que nous sommes tous comme Frank, toujours prêts à y retourner, alors que l'on sait pertinemment ce qui peut nous arriver : nous noyer dans le miroir de notre image.

L'ami :

L'amant :

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