Marguerite et la vérité
Marguerite est un film réjouissant qui replace la candeur au cœur de la morale.
Nous sommes dans les années 20, Marguerite séjourne dans un château en banlieue parisienne. Comme elle le dit si bien pour elle : "L'argent n'a pas d'importance, l'important c'est d'en avoir".
La candeur de Marguerite tout au long du film nous impose une question simple. Faut-il dire toute la vérité ? A l'instar des protagonistes qui entourent Marguerite, on aurait envie de répondre à cette question et se rallier au bon sens populaire qui nous souffle aux oreilles que toute vérité n'est pas bonne à dire. Dans un élan pragmatique on introduit ainsi dans les relations humaines et sous couvert de bon sentiment une petite dose de cynisme dans la vie de tous les jours, comme l'huile indispensable pour faire tourner les rouages de la société.
Cependant cette petite concession en invitant le mensonge dans les rouages de notre morale ne peut que faire chavirer la philosophie classique quand on la pousse jusqu'à l'excès. Ce qui est le cas du film. Toutes les philosophies dont la quête est la vérité ne résistent pas longtemps face à Marguerite qui à force de chanter archi faux oblige son public à sortir de sa réserve. Marguerite chante avec tout son cœur et toute son âme et en plus de ça elle travaille dur, très dur, pour finalement massacrer à son insu tout le répertoire de l'opéra classique. Que faire face à autant de candeur et de passion ? On lui dit ou on ne lui dit pas ?
La philosophie classique et toute la justice et la morale qui en découlent se trouvent au pied du mur. Faut-il avoir la noblesse de lui dire la vérité ou la délicatesse de la lui cacher ? Ce qui aurait du n'être qu'un petit mensonge de l'ordre du "j'adore ce que vous faites" sans en penser un mot, un soir de représentation, devient avec Marguerite une affaire d'état. Elle va chanter archi faux dans une grande salle parisienne pour les orphelins de la grande guerre. Dans sa candeur en chantant en publique elle va faire honte à tout ceux qui l'on flattée par intérêt ou par lâcheté.
Deux formes de vérité s'affrontent dans le film. La vérité subjective de Marguerite qui pense être une diva et la vérité objective de tous les autres qui assistent au jeu de massacre.
Alors où est la vérité ? La vérité du ressenti ou du consenti ? La vérité intérieure ou la vérité universelle ? Laquelle est la bonne ? Un peu des deux, auraient tendance à dire les gens biens pensants. Mais avec Marguerite on ne bidouille pas avec la vérité.
Ce que Marguerite entend juste de l'intérieur, sonne faux pour ses auditeurs. Faux à un point que la foule va devoir écraser sa singularité pour faire valoir la vérité, au dépend de son ressenti.
La vérité universelle devient cruelle car elle n'est plus une vérité mais la réalité. La réalité est une vérité qui se venge des autres. Rien de mieux que la science pour transformer une vérité en réalité, c'est ce que fait admirablement le film à la fin. Pour ma part je reste au coté de Marguerite en pensant que la seule vérité qui vaille c'est la notre, la réalité n'est là que pour qu'on la change.
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