Valérian


La sortie de Valérian et la Cité des mille planètes a été très controversée. Pour ma part je trouve le film assez rafraichissant et nous conforte dans l'idée que le cinéma américain n'a pas le monopole des films à gros budgets et gros effets. Le film semble à l'instar d'Avatar nous ouvrir la porte vers un environnement numérique de moins en moins virtuel dans lequel les générations futures pourraient bien passer une bonne partie de leur vie.

Ce qui est déconcertant dans ce film c'est l'enchainement de tableaux et d'univers très différents qui s'effectuent au détriment d'une œuvre purement cinématographique qui devrait nous plonger dans un univers cohérent plutôt que de nous trimbaler d'une ambiance à une autre. Faute de décor stable, on pourrait se raccrocher aux 2 personnages principaux que sont Valérian et Laureline mais là où l'on aurait pu s'attacher, Luc besson nous propose 2 ados sans saveur et sans odeur.

Ce film n'est finalement plus un film mais une représentation de ce que sera le divertissement numérique de demain quand le cinema sera devenu aussi ringard que l'est le théâtre aujourd'hui.

Si les acteurs sont à la fois mignon et fade, c'est bien parce que dans le futur nous voudrons être les héros de nos propres divertissements et qu'il y a de fortes chances que nos qualités d'acteurs pour ceux qui pourraient visionner nos péripéties ne dépassent pas les talents de nos 2 protagonistes qui ouvrent la bouche quand ils sont étonnés et qui écarquillent les sourcils en plus quand ils sont très surpris. Un peu comme ces photos qu'on prend de nous lorsqu'on nous lâche du haut d'un manège.

Si le monde numérique de demain va démultiplier nos possibilités de nous étonner, il va aussi limiter nos possibilités d'exprimer nos sentiments. Là où Luc Besson voit juste c'est que le monde demain va sans doute ressembler au sien. C'est à dire un monde ou l'on s'immerge dans l'univers de Star Wars le matin, dans celui d'Avatar pour la pause déjeuner et dans un univers à la 2000 lieux sous les mers avant d'aller se coucher.  La réalité numérique est fille du zapping et ressemblera à une vie qui changera de décor par le clic d'une télécommande que nous n'avons pas lâchée depuis l'avénement du multi-channel. Demain sera la suite logique de cette irrésistible envie de faire la queue dans les aéroports pour découvrir au plus vite d'autres mondes sans rien lâcher de notre confort ou d'aller à Paris avec ses enfant pour surtout visiter Disneyland.

La Cité des mille planètes, sous titre du film, préfigure l'inversion qui s'annonce entre la planète et la ville. Nous sommes aujourd'hui la planète des mille cités, notre population vit depuis ce nouveau siècle en majorité dans les villes et ce phénomène ne fait que s'amplifier. Une fois que notre planète ne sera plus qu'une grande ville c'est à dire urbanisée dans ses moindre recoins par la fibre et les drones, c'est cette "monopolis" qui inventera une diversité de planètes dans des dimensions numériques qui en devenant infinie par sa puissance de calcul et qui remplacera cet autre infini que nous appelons pour l'instant l'espace. C'est notre notion de l'espace qui va radicalement changer allant jusqu'à bousculer probablement notre notion du temps.

Il faut donc aller voir Valérian non pas pour se plonger dans un univers régressif à la Star Wars, non pas non plus pour passer un grand moment de cinéma, le scénario et les acteurs sont transparents, mais pour imaginer avec Luc Besson le monde très divertissant de demain. Un monde à haute vitesse où nous serons passés de l'homo sapiens à l'homo hollywodien, où nous prendrons la place des acteurs d'aujourd'hui qui pour la plupart s'agitent en motion capture devant un fond vert vidéo. Bref un monde où nous aurons aplati le relief de notre réalité pour en créer une autre plus vertigineuse.

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