Ave César



La cérémonie des Césars ne fait que caricaturer les phantasmes de notre monde. Ce que nous aimons par dessus tout, à tel point qu'il semble aujourd'hui nous dominer, c'est l'argent. L'argent sonnant et trébuchant qui convertit tout en tout. La valeur d'échange par excellence. Tout s'évalue, se compare, s’additionne grâce à la monnaie. Expertise, contre expertise, audit, et finalement le marché, pour nous donner la valeur interchangeable des choses.
Alors pourquoi ne pas, dans ce délire de l'équivalence, comparer la prestation d'un Jérémie Renier à celle d'un Jean-Louis Trintignant. Si il y a bien quelque chose que l'on ne peut pas comparer c'est bien la valeur artistique des choses. Pourquoi niveler dans une enveloppe ce qui nous séduit par ses différences. Le Cinéma est diverse. Il est sublime justement quand il ne se répète pas. Alors pourquoi vouloir le comparer à lui même. La création n'existe que parce qu'elle est unique. Quelle drôle d'idée de la célébrer en la normalisant par un jury et des catégories qui ne font que dépecer devant nous ce bel animal vivant qu'est la production cinématographique. Ce que la cérémonie des césars tente de faire, c'est tout simplement de faire rentrer une année de cinéma français dans une soirée de gala d'autoproclamation. Voilà bien le phantasme de notre siècle qui veut tout classer, tout digérer. L'ironie de cette soirée, qui veut arriver à faire rentrer toute la beauté et la diversité du cinéma dans une boite, c'est que les gagnants, n'auront qu'une compression en guise de trophée. Ils l'ont bien méritée. Celui qui fut avec talent un homme pressé, n'est plus qu'aujourd'hui grâce au César qu'une carrière compressée. Ave César.

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