Raid dingue

Raid dingue est une bonne surprise. Une comédie à la hauteur des Ch'tis (voir article bienvenue dans le Nord), on en redemande.

Dany Boon souhaitait faire un film d'action policière comique à l'instar des films de Belmondo.
Comme les temps changent, la police, la vraie, c'est aujourd'hui le RAID.

Ce qui qui n'apparait pas dans la bande annonce et qui agit comme une interpellation au moment du film  c'est une scène très réaliste d'assaut de terroristes dans une usine, qui vous replonge dans le flash back de l'assaut des terroristes de Charlie Hebdo et de l'hyper kasher . Ces images qui ont tourné en boucle sur toutes les chaines de télé 24h/24 et qui sont profondément ancrées dans notre inconscient collectif. Cette scène n'a pas grand chose de comique, elle est là pour réparer une injustice, tordre le coup à une superstition que serait Froissard (Dany Boon) qui porte la poisse. Froissard le poissard. C'est donc de cette scène qu'il faut partir pour trouver tout le sens du film.

C'est la force de Raid dingue d'avoir su, 2 ans après Charlie, remettre en scène le Raid dans une comédie. La force des plus belles démocraties, c'est d'aimer leur police.
Raid dingue est un film où Dany Boon règle ses comptes avec le terrorisme de la plus belle manière puisqu'il a pris le parti d'en rire. Ainsi faute de pouvoir désamorcer toutes les bombes il a au moins le mérite de désamorcer toute forme de fanatisme qui pourrait appuyer sur le bouton.

Charlie défend cette idée que la religion n'a pas le droit de nous empêcher de rire de tout. Dany Boon va donc en tant que porte flambeau de notre humour national régler ses comptes au coté du raid avec les terroristes qui nous ennuient avec leur pensées mortifères.

Notre héros national est une femme Johanna Pasquali fille de ministre maladroite qui rêve de faire carrière dans l'élite de la police , le raide .
Dany Boon sait que combattre le terrorisme c'est d'abord  en découdre avec ses propres démons.

L'un de principaux choc culturel que représente l'intégration de la religion musulmane dans la République française se résume à la place de la femme dans notre société. Si on peut critiquer en tant que laïc les droits de la femme musulmane, on peut aussi commencer par balayer devant sa porte.
C'est ce que fait habillement Dany Boon en donnant le premier rôle de son film à Alice Pol au lieu de tirer la couverture à lui. Une femme dans le rôle principal d'un film d'action policière du jamais vu en France. Le nouveau Belmondo ne serait pas Jean Dujardin mais Alice Pol. Yessss.

Cette femme donne un nouveau visage au héros policier. Voici en quoi elle diffère de l'archétype masculin que l'on nous a dépeint ad-nauseum.
Elle n'est pas la meilleure mais elle a un bon fond.
Elle ne fait pas carrière, elle aime son métier sans cynisme.
Elle ne fait pas de compromis.
Elle ne ment pas, même pour les belles causes comme sauver son mariage.
Elle n'est pas superstitieuse (donc pas religieuse).
Elle ne fait pas corps quand les autres ont tord.
Sans oublier le meilleur : notre héroïne ne tue pas puisqu'elle a cette heureuse maladresse de viser le cœur et d'atteindre les couilles de ses opposants.

Le film est truffé de symboles qui nous montrent que nous vivons encore dans une société empêtrée dans une culture patriarcale qui nous empêche de regarder le terrorisme en face et de réaliser que le pouvoir du 21ème siècle n'est plus un pouvoir de répression mais de séduction.
Comprendre les terroristes est une arme plus forte que de les haïr. Pour ça il faut changer de point de vue, c'est ce que nous propose Dany Boon dans son film. Tous les ingrédients du film comique d'action sont là, sauf que tout est différent.

Il faut tordre le coup une bonne fois pour toute aux privilèges que l'on se targue d'avoir supprimé lors de la révolution et qui sont toujours là. La preuve ce n'est pas le camp des rebelles qui explose à la fin du film mais bien le plus beau château de France avant Versailles. Il y a une forme de jubilation de la part du réalisateur quand il met en pièce Vaulx-le-vicomte. C'est lui ce roi fou qui appuie sur ses missiles chargés d'humour et qui dans un grand éclat de rire coupera court aux privilèges de châteaux et remettra la France à plat. Le film Raid dingue s'en prend au pouvoir. Les assaillants ont le choix entre 2 cibles à la même heure : détourner de l'or ou abattre l'ordre établi. On peut parier que notre Dany est assez riche aujourd'hui pour avoir lui aussi envie de nous proposer une autre vision du monde plus féminine, plus tolérante et de choisir la justice au détriment de l'or.

Alice Pol serait-elle dans son incarnation de Johanna Pasquali et par cet anagramme troublant "la police" dont nous aurions besoin ?

Car le film en plus de jouer avec le comique des situations sait jouer avec l'absurdité des mots et des privilèges en nous décochant régulièrement cette réplique qui ridiculise les petits arrangement du pouvoir :
"- Pasquali comme le Ministre?
"- Ca n'a aucun rapport, c'est sa fille, mais ça n'a rien à voir."