Dans la tête de Bill Viola


On a finalement décidé d'aller voir l'exposition de Bill Viola, que dis-je, de la rétrospective de l'artiste avant que qu'elle ne ferme le 21 juillet.
Bill Viola fait de la vidéo, pas une vidéo ludique, non une vidéo d'art lente et pénétrante. Pour bill Viola la vidéo d'art est un plan fixe dans laquelle on ne parle pas. Bref Bill Viola produit une forme dégradée de cinéma qui s'apparente à un tableau dont les personnages bougeraient plus ou moins lentement à l'intérieur. Dans ce domaine Bill Viola est sans doute le plus reconnu de ces artistes. On ne peut donc pas parler de l'art vidéo de Viola sans se poser la question de la place de la vidéo dans l'art.
La vidéo d'art bouscule la perception que l'on a de l'art en général. Si la photo pose toujours encore problème à certains, comme œuvre d'art puisque elle est duplicable, que dire de la vidéo  qui repose sur l'universalité aujourd'hui acquise d'un monde de pixels qui peut circuler et se reproduire à l'infini. En plus d'être duplicable le signal vidéo est immatériel, on a besoin d'écran ou de projecteur pour l'accrocher au mur. Ainsi si la photo questionne l'idée d'œuvre unique, la vidéo met en question nos murs donc finalement notre espace. Que faire d'une œuvre que je ne peux ni poser, ni accrocher? L'œuvre est encodée et ne se livre que si l'on appuie sur start ou alors elle tourne en boucle.
A l'instar de la musique l'œuvre vidéo n'existe que dans la conscience que nous en avons. Le cinéma a pour objectif de nous divertir, les vidéo de Viola font l'inverse. Elle semble écraser la futilité de nos êtres par le poids du temps qui passe. Ce temps qui passe est toujours là dans l'art de Bill Viola. C'est toujours lui qui tient le premier rôle. A tel point qu'il se métamorphose la plupart du temps dans sa représentation la plus évidente : l''eau qui coule. Cette eau qui a raison de tout puisque même les montagnes on été façonnées par elle. L'eau et le temps de font qu'un. C'est ce que l'artiste nous montre œuvre après œuvre. Nous ne sommes qu'un reflet de ce temps qui passe et qui nous engloutit. Le désert et le feu repris parfois par l'artiste ne sont que la représentation en creux de cette même idée. Qu'est ce qu'un monde sans eau où le temps s'évapore ? Forcément l'enfer d'un désert.
L'art vidéo est un art mal né parce qu'il nous oblige à nous boucler dans des salles obscures pour en profiter. Si le cinéma a depuis ses débuts trouver son format, le confort d'un fauteuil dans une salle sombre et tranquille, l'art vidéo ne sait pas comment se montre.

Il n'y a qu'un seul art. L'art de vivre. Si aller voir un bon film au cinéma est toujours une fête, l'expérience de l'art vidéo ne semble pas aujourd'hui encore avoir trouvé comment contribuer au grand art de notre vie. Profiter d'une vidéo d'artiste reste une expérience maladroite, voire désagréable où l'on se bouscule, où l'on se gêne, où l'on a toujours l'impression d'arriver trop tôt ou trop tard. L'art vidéo tourne en boucle, pas nous. Imaginer une salle de cinéma où en permanence des personnes sortent et rentrent et où l'histoire qui déroule sur l'écran n'en est pas une ?
La vidéo se veut art par la magie de l'image animée, elle a toutes les qualités esthétiques pour prétendre à être un art mais elle achoppe encore et toujours sur un point : elle ne trouve pas sa place dans notre art de vivre. Une vidéo d'art ok c'est bien, mais pour quoi faire ? On déambule donc dans cette rétrospective comme des chauve souris, comme si on était rentré dans la tête et la conscience de de Bill Viola et curieusement que les images soient séduisantes ou non, on a finalement envie d'une seule chose, en sortir. Non pas tant que son art nous sorte par les yeux, mais que nous avons sans doute au bout d'une heure d'expo une envie pressante de sortir des siens.

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