L'Hermine


L'Hermine est un très joli film tout en finesse qui nous plonge dans les audiences d'une salle de tribunal par le truchement de son président, le personnage central du film. Non seulement le film évite avec bonheur les écueils du film de ce genre, en évitant toute caricature. Mais en plus le film a le mérite de nous rappeler, à force de lavage de cerveaux par les films américains, à quoi ressemble un procès dans notre république. Au delà de son exactitude le film nous offre de découvrir les coulisses d'un procès sans tomber dans le romanesque. On assiste à la pause déjeuner des jurés, aux explications indispensables, avant que la sonnerie ne retentisse et que la cour fasse son entrée.
L'enjeu du procès est en soi sans grande importance, même si le crime jugé, infanticide à coups de rangers, donne plutôt dans l'horreur et dans le désir de vengeance. L'objet du film n'est pas de trouver le coupable mais de montrer comment la justice opère, tous les jours avec des jurés de tout bord, des avocats qui passent plus de temps sur leur portable qu'à se concentrer sur l'audience. Le film nous montre tous les ragots qui entourent la réputation d'un président jugé intraitable, surnommé le Président à 2 chiffres, pour figurer que ses peines ne tombent jamais sous les 10 ans.

Peut-on rendre la justice de la même manière quand on est grippé, en cours de divorce et aigri par une déclaration d'amour sans suite, que lorsque l'on est en bonne santé et épanoui ?  Ditte, un amour sans suite du président rencontré un jour à l'hôpital, réapparait dès le début du film comme l'un des membres du jury. Le président du tribunal, Michel Racine, parfaitement incarné par Fabrice Lucchini est bouleversé de la revoir. Ditte Lorensen-Coterêt est solaire, d'un beauté délicate et naturelle qui émane si souvent des gens qui combinent humanité et intelligence. La justice face à la beauté, voilà le joli thème philosophique que nous propose le film. La beauté c'est l'intelligence qui nous touche. C'est exactement ce que fait Ditte tous les jours à l'hôpital, médecin qui excelle aussi bien dans ces compétences d'anesthésiste que dans son empathie bienfaisante chaque fois qu'elle prend la main de ses patients.

L'Hermine est un film qui déroule subtilement l'idée que la justice n'est pas toujours obligée de connaitre la vérité pour trancher. Le président lui-même nous explique sans doute touché par la grâce de Ditte que faire coïncider le vrai et le juste est une ambition prétentieuse. On ne saura jamais tout, il faut pourtant juger. Le "président des verdicts à 2 chiffres" doute depuis le retour de Ditte dans sa vie. Son envie de punir s'assagit par la simple présence de Ditte dans la salle, qu'il finit par réclamer, pour s'apaiser. La justice doit trancher entre le bien et le mal, non pas entre le vrai et le faux.

Ditte est belle parce qu'elle fait du bien autour d'elle. La beauté aurait-elle donc plus d'accointance avec la justice que son indéfectible compagne la vérité ? Pour un esprit apaisé, la justice n'opèrerait-elle pas plutôt comme un coup de foudre de ce que l'on pense être bien et non pas vrai. Le film aborde ce sujet délicat, avec une finesse rare et une interprétation juste dans laquelle l'héroïne de la série danoise Borgen s'en sort admirablement bien au coté d'un Lucchini dont le jeu est de moins en moins cabotin ce qui sert parfaitement son personnage qui est finalement un homme comme tout le monde. Un homme dont la fragilité peut le conduire au meilleur comme au pire, inspiré ou frustré par les aléas de l'amour. Un film qui sonne juste et qu'il faut vraiment aller voir.

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