Metropol Parasol : des champignons hallucinants

On est en droit de se poser quelques questions quand on découvre le projet pompeusement appelé Metropol Parasol et que les autochtones ont vite fait de surnommer "Las setas" c'est à dire "Les champignons" en référence à leur forme mais aussi peut-être de manière plus subliminale à son côté hallucinant. A l'origine il fallait réhabiliter un marché couvert tombé plus ou moins en ruine ce qui devait être fait jusqu'au jour où l'on découvre des vestiges romains qui paralysent le projet et qui conduit à un appel d'offre international pour la réhabilitation du site. Nous sommes en 2006 l'immobilier est en plein boom. La ville choisit le projet le plus cher et le plus mégalomaniaque conçu par un architecte de Berlin.

Le secret pour rater un projet, c'est d'abord de vouloir tout fourrer dans le même projet. Ainsi en plus d'un parking il faudra conserver le marché, concevoir un musée pour présenter les vestiges, prévoir un espace culturel et bien sûr un restaurant. Pour gagner le coeur des élus il faut donc bourrer toutes les attentes dans le même projet ce qui augure déjà de l'échec induit par sa programmation boulimique. On ne peut donc pas en vouloir à 100% aux architectes qui sont souvent eux-mêmes les victimes d'élus déboussolés. Mais quand même ils en rajoutent souvent une couche.

Ayant moi même fréquenté des architectes capables d'accoucher d'une telle structure il n'est pas rare qu'une fois les plans réalisés à l'aide de très très nombreuses vues en 3D, le cabinet se désintéresse un peu, voire beaucoup de la faisabilité du projet.  Et l'on vous regarde souvent comme un martien quand vous osez demander en quoi la structure sera faite. On vous répond invariablement légèrement dégoûté par le prosaïsme de votre question " qu'un bureau d'étude s'en chargera". C'est quand même pas à l'architecte de faire des constructions qui tiennent debout.

On se retrouve donc sans surprise avec un projet qui après avoir été sélectionné en 2005 s'avère inconstructible suite à un rapport produit en 2007 et resté secret. Il faut attendre 2009 pour que la municipalité trouve une solution et publie alors les déboires structurels de nos champignons. Le budget initialement estimé à 33 millions d'euros ( ce qui qui est déjà pas mal pour un parking et quelques emplacements dans un marché couvert), flambe pour atteindre la coquette somme de 100 millions d'euros. Le marché ouvre fin 2010 et l'accès à la promenade en mars 2011.

Ce chantier est un fiasco à la fois dans sa conception, sa gestion, ses délais et son prix, assez classique en somme. Mais en plus on doit bien reconnaitre que le projet ne tient pas ses promesses. Le marché couvert n'est pas en sous-sol (vestiges obligent) et remonte le niveau du sol de plusieurs mètres avec des accès par escalators et une grande volée de marches qui nous rappellent les mauvaises heures de l'architecture sur dalle dont on est déjà pourtant revenue. Cette élévation a un effet dévastateur sur l'ensemble du projet d'une part parce que la ville de Séville est une ville plate et que toues les rues buttent sur cette surélévation incongrue mais en plus, travaille de manière contre productive au projet qui voulait donner  à notre structure un coté aérien et donc les pied se retrouvent pris dans cette dalle qui couvre le marché.

La beauté organique du projet se trouve irrémédiablement avalé par une architecture de dalle digne des pires zones HLM du siècle dernier. Pour clore le défaut du projet, le site ne propose aucun recule sur la structure. Seule consolation la promenade sur le toit qui nous fait oublier l'enlisement du projet. Mais qui à part les touristes vont donc monter sur ce toit accessible curieusement par le sous-sol et payant ? Ce projet n'apporte donc rien aux habitants de Séville. Le  nouveau marché est sinistre est hors de prix, l'antiquarium n'intéresse personne, le restaurant est désert, les commerces sur les 4 cotés de l'espace désaffectés. Dommage il y avait sans doute quelque chose de bien à faire ici sans renier les idées avant-gardistes de nos jeunes architectes, mais vraiment pas comme ça.





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