La casa de papel


Je vous ai plutôt habitué à une chronique cinéma mais il faut reconnaître que certaines séries valent bien la peine elles aussi d'être décortiquées. C'est la cas de La casa de papel qui cartonne sur Netflix et qui vient de sortir sa deuxième saison. Au prime abord la série nous semble se calquer sur le modèle des films de braquage de banque, avec ses sempiternelles prises d'otages et coup de fil à répétition avec "le négociateur". Pour le reste la série est quand même assez rafraichissante et nous offre une ambiance de huis clos plutôt réussi. Comme dans tout braquage il y a un cerveau. Mais si autrefois piller les réserves d'or semblait être l'ultime défi d'un casse, l'évolution de la politique monétaire mondiale nous oblige aujourd'hui à voir la monnaie papier comme la seule valeur symbolique à laquelle nous pouvons nous raccrocher.

Aucune banque ne se soucie aujourd'hui d'avoir des réserves qui correspondraient ne serait ce qu'à une fraction de ce qui est émis. Tout le système bancaire est basé sur la solvabilité de ceux à qui les banques prêtent. La logique n'est donc pas de prêter en fonction de l'argent que l'on a dans son coffre mais de le créer à partir de rien en produisant ex-nihilo, autant de liquidité qu'il y a de demande de prêts acceptables. Cette situation est à rebrousse poil de l'intuition que nous avons, à savoir que pour pouvoir prêter de l'argent à quelqu'un il faut au préalable l'avoir économisé. Ce n'est pas le cas des banques.

Quand vous confier votre argent, il n'est pas gardé dans un coffre, on s'en doutait, mais quand une banque centrale à besoin d'argent il lui suffit d'en produire sans que cela ne coûte rien à personne si ce n'est le prix de l'encre et du papier. Si les banques centrales ne volent personne en créant de l'argent en masse sous le vocable abscons de "QE pour Quantitative Easing". Il en va de même pour le cerveau de cet opération qui compte imprimer un maximum de billet de 50 euros pour son compte et celle de son équipe en ne lésant personne à l'instar des banques.

La série nous emmène dans ce monde surréaliste dans lequel nous vivons où l'argent établit la valeur de tout, alors que lui même ne vaut que par la confiance qu'on lui accorde.

Ainsi, ces derniers jours pour remercier Arthur et Célestin de leur travail au jardin, je leur ai donné un palmier par jour, avec 3 palmiers, ils pouvaient avoir un flamand rose et avec 5 flamands roses une boite de cartes Pokémon. Théoriquement il me suffit donc de braquer un camion de cartes Pokémon pour produire de la valeur en faisant travailler toute une nouvelle génération accro au Pokémon. Il est fort probable qu'ils trouveront eux mêmes des copains capables de leur rendre des services en échange de cartes plus au moins rares. En principe on n'a donc pas besoin de banques. En pratique, on a bien les banquiers que l'on mérite.

On comprend donc toute la valeur symbolique des masques de Salvator Dali, figure emblématique du surréalisme, choisi par le cerveau pour tous les membres de l'opération. On peut aussi remarquer la proximité de ces masque avec celui du film Vendetta récupéré ensuite par les indignés.
Là où Vendetta allait rallier le peuple anglais pour détruire leur parlement qui ne parvenait plus qu'à voter des lois liberticides, La casa de papel nous propose de s'attaquer à l'absurdité des politiques des banques centrales qui nous prêtent avec interêt de l'argent qui ne leurs coûte rien.



"La maison de papier" est donc une belle métaphore de ce que sont en réalité nos banques dans le monde entier. Mais il ne faut pas négliger que cette série nous parle aussi plus particulièrement de l'Euro qui atteint les sommets du surréalisme monétaire, puisqu'il nie l'adéquation ancestrale entre la banque centrale et chacun des pays membres. Hors de la zone euro un pays qui ne peut plus payer ses dettes fait tourner sa planche à billets. Les pays de la zone euro n'ont plus ce luxe que s'arroge ironiquement les braqueurs de la série à longueurs d'épisodes. Ces rotatives qui tournent à pleine vitesse jour et nuit produisant sous nos yeux hypnotisés des kilomètres de billets, les états de la zone euros n'y ont plus accès, c'est un aller sans retour. La monnaie est contrôlée par un Eurogroupe que personne n'a jamais élu et qui gère la politique monétaire de l'euro comme si il s'agissait encore du deutsche mark.

La première victime de cette dépossession a été la Grèce. Mais le pays qui peut sans conteste faire écrouler le jeu de cartes de la monnaie européenne dans le futur, c'est sans doute l'Espagne. Au même titre que l'Italie, ces économies peuvent par leur poids dans la zone euro entrainer la faillite en série de notre système bancaire.

Il y donc un quelque chose de jubilatoire à voir cette poignée d'espagnols en combinaisons rouges reprendre les commandes de leur monnaie en en produisant pour eux sans demander l'autorisation à personne. Là où la BCE au travers de l'Eurogroup a pris le peuple grecque en otage pour infliger des mesures d'austérité odieuses et contre productives à leur pays, la série La casa de papel renverse la donne. Les braqueurs prennent à leur tour en otage le peuple pour défier le pouvoir national et pour produire des liquidités dans des quantités extravagantes. Ce qui n'est pas sans nous rappeler les montants mirobolants que la finance est capable de perdre ou de gagner en quelques jours sans rapport avec la réalité et sans nous consulter.

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