Tom à la ferme

Tom à la ferme est un film qui nous parle bien sûr de la difficulté, voire l'impossibilité d'être ouvertement homo dans les campagnes plus ou moin reculées du monde entier, mais il nous questionne aussi sur la notion de virilité.

Notre charmant petit Xavier (réalisateur et interprète) utilise le phénomène marginal de l'homosexualité qu'il connait bien  pour nous emmener dans une perspective plus large du rapport de  l'homme (qu'il soit homo ou hétéro) et de sa virilité. Dès les premières images le réalisateur nous donne le sentiment d'une route sans issue, cette longue ligne droite qui emmène Tom nulle part et d'où il faudra bien à la fin du film repartir. Si on le peut !
L'histoire commence sur un enterrement. Celui du "petit ami" de Tom dont la mère ignore qu'il est homo puisque que son autre fils, qui est toujours resté à la ferme, a créé une petite amie imaginaire à son frère parti à la ville. En arrière plan le film nous propose aussi d'aller enterrer la violence qui  forme un couple intime avec la virilité. 

Peut-on aimer la force sans une certaine complaisance pour la violence ? Tom roule tout droit vers cette question au fin fond de la campagne québécoise, dans la ferme familiale de son compagnon (dans un plan 100% Bobby Production, filmé en hélicoptère, sur la chanson Les moulins de mon cœur de Michel Legrand). Le film est bel et bien monté comme un thriller angoissant et impitoyable. Virilité et violence ne vont pas se quitter comme ça sans que cela ne tourne à l'horreur. La voiture de Tom a été montée sur cale à son insu dans une ferme reculée dont il ne peut plus s'enfuir. Qui de l'homme ou de la violence aura la peau de l'autre ?

Cette ferme suinte la violence, les vaches et même les veaux meurent, sans doute dû aux actes mortellement déments du frère du défunt qui incarne cette virilité pris en otage par la violence. La mère elle aussi n'est pas en reste pour balancer des baffes. Même la nature devient redoutable car en octobre chaque feuille de maïs est tranchante comme des couteaux dans les champs qui encerclent la propriété. Tom n'a plus de voiture et ne peut donc pas s'échapper par les champs de maïs qui le lacèrent dans sa fuite. La ville métrosexuelle, lui est inaccessible, la campagne le retient. Il doit donc faire face. Faire face à ses propres démons. Pourquoi a t-il lui aussi cette attirance pour cette virilité brutale, à la Wolverine, incarnée par son beau-frère?

Seule solution, il doit la regarder en face pour pouvoir mieux la désarmer. Comment déshabiller la virilité de sa violence sans la ridiculiser. Le remède existe, il se danse, c'est le tango. Le Tango est la danse de la raison, puisqu'elle a l'intelligence de parodier la passion. Le tango est la seule danse que les hommes dansent entre eux. Elle met en scène le machisme comme un style aux motifs infinis, comme une relation à la fois légère et consentie, bref comme une danse qui par son insoutenable légèreté écrase le machisme comme outil de domination et anéantit ainsi la violence qui s'y logeait à ses dépends. Tom sauve sa peau. Il arrive finalement à fuir et à ne pas se faire emporter par l'érotisme mortel de la violence masculine. Il ne parviendra pas pour autant à sauver le monde avec lui puisque son beau frère, désinhibé avec deux lignes de coke le temps d'un tango, ne parviendra sans doute jamais à trouver un autre point d'appui que la violence pour prouver qu'il est un homme. Pourtant il clame qu'il essaye de son mieux à l'instar de l'humanité qui ne sait toujours pas vivre en paix sans violence.

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