Gone Girl : Amazing


Avant Propos

Quelques personnes n'ont pas hésité à me faire remarquer que mon propos sur les films est quand même très personnel et parfois que mon analyse dépasse surement ce que le réalisateur lui même à bien voulu y mettre. Certes, mais mon but n'est pas de donner un avis plus ou moins objectif sur la qualité d'un film mais de chercher en toute subjectivité ce qu'il m'évoque.

Notre subjectivité en tant que telle n'en demeurant pas moins une émanation objective de nous même et de notre époque. C'est à ce titre que je trouve intéressant de donner mon avis (ça on le savait) sur le cinéma qui reste sans doute la forme artistique la plus vivace de notre vie contemporaine. Je cherche donc à travers ma propre interprétation, aussi "tirée par les cheveux soit elle" de vous donner la manière dont je ressens la portée symbolique de chaque film qui en vaut la peine.

Cette analyse n'engage que moi, c'est donc plutôt moi qui me relève plus que le film dans cet exercice. Mais peut-on parler finalement d'autre chose que de soi ? . Nietszche prétendait que tout philosophe et donc toute philosophie est autobiographique, j'y souscris volontiers en poussant ainsi toute tentative d'universalité vers les sorties de secours. Ce que nous disons n'engage que nous, mais c'est bien en parlant de nous, comme l'a si bien fait Montaigne, que nous sommes le plus en droit d'engager notre époque et l'humanité que nous représentons.

Bref chaque fois que je vous parle d'un film je vous parle finalement du spectateur que je suis et de l'époque qui m'entoure. Voilà sans doute pourquoi des films comme Shakespeare in love ou Amadeus me plaisent autant. Justement parce qu'ils ressemblent à ma démarche : relater l'oeuvre d'un artiste remis dans le contexte symbolique de son temps. N'est-il pas fascinant de penser aux spectateurs qui s'agglutinaient dans le théâtre du Globe pour s'émouvoir des oeuvres de Shakespeare au moment où il les écrivait et les jouait plutôt que de recevoir son oeuvre après le prisme de critiques. N'est-il pas passionnant de vivre Mozart dans les yeux envieux et dédaigneux de Saglieri plutôt que de se taper une énième audition du requiem dont la beauté universelle semble l'avoir lavé de toute trace de son temps.

Je ne cherche pas à dénigrer l'art mais à revaloriser ceux qui le reçoivent. La subjectivité de chacun n'est-elle pas la seule chance que l'art a de rester un art de vivre ? Voilà pourquoi j'aime le cinéma parce qu'il est contemporain et devient à travers ma subjectivité un témoignage vivant de notre époque. Voila pourquoi je vais vous parler aujourd'hui de Gone Girl.

Gone girl

A mon avis, Gone Girl se passe dans la tête ce celle qu'on appelle Amy. Tous les personnages mis en jeu sont, de mon point de vue, des représentations de ce qui se trame dans sa tête. Voilà pourquoi ce film démarre par ce gros plan sur le crâne d'Amy et se finit de la même manière. Remarquez cette main d'un personnage hors champs qui lui gratte la tête. C'est l'autre, cet autre qui lui pose cette question pressante cette unique et ultime question qui la définit " Tu penses à quoi Amy ?" .

Nous allons donc rentrer pendant tout le film dans la tête de cette blonde pour y trouver la construction de son être. Amy est un mélange, d'une part un être relativement banal mais épris de vérité, Nick, incarné par Ben Affleck mais aussi une image qu'elle veut donner d'elle qui est le personnage d'Amy. Bien sûr cette image est construite, cette image est celle que vos parents veulent voir et et que vous souhaitez plus ou moins consciemment renvoyer à vos parents. Pour vos parents il n'y a pas juste une Amy, il y a comme le met en scène fort justement le film  une "Amazing Amy". La construction de soi passe donc par cette adhésion difficile à  l'"Amazing" personne que vos parents sont persuadés d'avoir mis au monde ou par défaut à l'Amazing personne que vous voulez devenir à l'aune des critères sociaux que vos parents incarnent.

Ainsi le mariage dont parle le film n'est pas le mariage passionnel de deux êtres mais bel et bien le mariage houleux entre soi et l'image que l'on souhaite donner de soi. Tout le monde passe par là et tout le monde semble vous prévenir que ce mariage va vous réduire plutôt que de vous épanouir .

Amy ne veux pas être une image elle veut vivre, il y a dans Amy cette volonté de vouloir écrire sa vie et d'être libre. Elle veux bien être belle et intelligente mais le mariage d'argent que lui propose sa première aventure la rebute car elle ne se sent pas assez "Amazing " à ses cotés.
Cette représentation de "wealthy" femme au foyer "voir de la  pute de luxe" elle va y mettre fin dans le film de la manière la plus gore et théâtrale possible. Amy ne veut pas vendre son âme au luxe. Voilà pourquoi elle va s'enterrer au Missouri au coté de Nick.

Notre image , nous dit clairement le réalisateur, se construit avec l'argent. Sans argent notre image a vite fait de retomber dans les bras de notre vraie personnalité alias Nick, alias Ben Affleck pétrifié par ce retour de l'enfer de sa pure représentation sociale quand elle se retrouve désargentée. Amy se cherche et donc se ment à elle-même.  Elle est en fait beaucoup plus ordinaire qu'elle le souhaiterait l'être. Sa soeur jumelle est sa conscience, qui s'étonne de ne pas tout savoir. Pourquoi tromper son image (sa femme blonde ambitieuse) avec une autre (sa maitresse brune ordinaire) sans en parler à sa conscience, semble nous dire cette soeur prête à tout entendre à condition que l'on ait le courage de lui en parler. C'est à dire, comme nous sommes sous le crâne d'une seule et même personne, de le penser.

Le film se termine sur cette réconciliation improbable mais réelle et cynique entre soi et l'image que l'on en donne sous les yeux omniprésents de la caméra qui s'impose comme le regard social des autres. Société (incarnée par une journaliste carnassière) qui se se réjouit déjà de la naissance d'une nouvelle âme innocente née de la procréation fébrile mais inévitable de l'être et du paraitre. Ce film est tout simplement AMAZING, courrez le voir.

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